top of page

L'étonnant voyage

J'entre dans l'Atelier


La lumière est partout 

Il est grand temps de partir

J'emporte avec moi un trésor

Un objet que mon regard accroche 

Ce coquillage sur un meuble

L'oiseau qui passe devant la fenêtre 

Un souvenir, une sensation, un mot 

Une déchirure. L'audacieuse épluchure 

Peu importe, je pars

Ainsi commence le long, l'étonnant voyage


Sur la toile les formes s'installent et me défient

Je vais les traquer, les essouffler, les disproportionner

Jusqu'à trouver leur fragile point d'équilibre

Je vais réinventer leur lumière 

Leur offrir une autre symétrie

Tenter de les rendre libres

Le dessin préliminaire m'ennuie profondément

Il figerait sur la toile une histoire qui n'aurait pas vécu

Et ôterait à l'œuvre, son humanité

Son nécessaire cortège de doutes, d'échecs

De désespérances

J'ai besoin de ne rien savoir 

Afin de me laisser porter


Je brûle d'approcher, à découvert

Cette inconnue qui est en moi et qu'il me faut atteindre

L'œuvre aboutie enfin ne peut naître 

Que de ce combat-là

Déroutant ballet où se mêlent étroitement

Gravité et légèreté


Je vais construire avec rigueur

Dans le seul but pourtant, de déconstruire

Puis construire à nouveau sur la toile

Agonisante et dépouillée, un possible devenir

Je dois trouver pour mon repos

L'indispensable


Permettre à la couleur de n'être pas stérile

La confronter à sa lumière

Renoncer à ce que j'aime et qui nuirait à l'harmonie

C'est le temps des choix, des séparations

C'est le temps d'aller voir de l'autre côté

Là où l'Art prend naissance et quitte le rassurant cocon

De l'œuvre académique

Pas d'alternative. Pas de compromis


Les pièges sont nombreux

Qui m'invitent à la paresse, au contentement

A la reproduction de surprenants effets

Être vigilante. Être en éveil


​Être indulgente aussi de n'être que ce que je suis

La toile finie détient les secrets de celle à venir

Ne pas l'oublier. Je dois mériter ma route

Elle est mon trésor et ma détermination

Bien plus que l'œuvre elle-même

Autour de moi le silence. Les pinceaux s'impatientent

J'ai mille choses à voir


Tant d'histoires encore à vous dire

Nous étions du voyage

bottom of page